chapître 7
Villfranche du Périgord.
Tout près de là se situe Villefranche du Périgord .Elle fut construite sur des terres françaises en 1261 par Alphonse de Poitiers, comte de Toulouse. La fondation de ces villes nouvelles (500 localités virent le jour dans le sud-ouest aux 13ème et 14ème siècles) revêt un intérêt économique mais aussi stratégique de la part de deux puissances rivales l’Angleterre et la France qui s’affronteront lors de la guerre de cent ans au 14ème siècle. Pour ma part, l’importance de Villefranche l’est à deux titres : C’est là que se sont fixés, en tant que métayers, mes grands-parents paternels arrivant d’Italie en 1927 ,et c’est là que je me suis mariée en 1974.
La France avait pratiqué au 19ème siècle la politique de l’enfant unique. La Grande Guerre avec son million quatre cent mille morts avait créée une grave crise démographique. L’Italie était toujours aussi prolifique et son flux migratoire vers les Etats-Unis tari par les lois des quotas de 1920 et 1924. L’entrée aux Etats-Unis interdite, le rêve américain s’effondrait. Il fallait trouver une autre destination pour fuir le fascisme grandissant mais surtout fuir la misère. La France avait besoin de bras. Les Italiens peuplèrent les plaines du Sud-ouest comme les Polonais devinrent mineurs de fond dans le nord du pays, se déplaçant par villages entiers.
Silvio Pasqualetto, mon grand-père épousa Adele Baïocco en **** à Pressana en Vénétie. Ils eurent 9 enfants : Elsa (1913), prénom que je trouvais si joli que je l’attribuai à ma fille aînée ; Pace (1918) qui veut dire Paix car elle naquit le jour de la signature de l’armistice de l’Italie avec l’Allemagne ; Maria et Vanarina dont je ne sais rien si ce n’est qu’elles moururent à Pressana avant 1927 ; puis Agnès en 1921.La coupure s’établit avec mon père prénommé Jean. Conçu en Italie, il passât la frontière clandestinement pour naître en France le 19 juin 1927, Mais il fut enregistré le 21 si bien que l’on ne sait jamais quel jour fêter son anniversaire. Il eut une 4ème sœur Thérèse (1919) et deux frères jumeaux décédés à quelques jours.
Mes grands parents tenaient une petite alimentation de village à Pressana, en Vénétie, au lendemain de la guerre. Ils faisaient crédit, mais comme les clients ne payaient jamais, ils eurent tôt fait d’être en faillite. C’est sans un sou qu’ils s’installèrent en Périgord. Mon père me racontait que ses sœurs aînées furent placées, qu’elles cueillaient des fraises de plein champs dix heures par jour, que ma grand-mère se rendait au village afin d’échanger une poule contre un pain de 4 (entendez par là : 4 livres ). Une existence de privations, au jour le jour, une existence miséreuse. De mes grands-parents paternels, je n’ai guère de souvenirs. Ils sont morts jeunes, lui en 1953 ; elle en 1955 : c’était une forte femme au visage rond, à la chevelure noire toute frisée. Une « nonna » qui faisait elle-même des tagliatelles fraîches et gobait les œufs crus ! (à suivre)